Vivre jusqu'à 150 ans : la science à l’assaut de la longévité
Santé

Vivre jusqu’à 150 ans : la science à l’assaut de la longévité


Il y a quelques semaines, lors d’un défilé militaire à Pékin, un micro ouvert a capté Vladimir Poutine affirmant — via son interprète — que l’homme pourrait « redevenir plus jeune, peut-être même immortel» grâce aux progrès de la transplantation d’organes. À cela, Xi Jinping a rétorqué que certains prédisent que « les humains pourraient vivre jusqu’à 150 ans » dès les prochaines décennies.

Cette conversation improbable entre deux dirigeants de poids a fait l’effet d’un électrochoc médiatique : attention suscitée, fantasme partagé, mais aussi un vent de scepticisme dans le monde scientifique. Plusieurs experts rappellent que les défis sont colossaux. Les greffes d’organes — surtout s’ils proviennent de donneurs âgés — peuvent même transmettre une sénescence active aux receveurs, les vieillissant plus vite . Une avancée prometteuse est néanmoins pointée : prétraiter des organes anciens avec des senolytiques, ces médicaments qui écartent les cellules sénescentes indésirables, pourrait atténuer ces effets néfastes.

Dans un registre connexe, des chercheurs de Boston Children’s Hospital et Harvard Medical School sont parvenus à prolonger de plus de 9 % la durée de vie moyenne de souris d’âge moyen en injectant des cellules souches « jeunes » provenant… de souris âgées ! Un paradoxe ? En réalité, ces cellules souches « jeunes » retardent les effets du vieillissement, réparent le système immunitaire, améliorent la force, l’endurance et même réduisent l’âge biologique mesuré épigénétiquement. Une piste tangible, même si, en pratique humaine, transplanter ses propres cellules multipliées en laboratoires reste complexe, mais prometteur.

On ajoute à cela des avancées scientifiques prodigieuses comme la reprogrammation épigénétique, capable de “rajeunir” des souris en restaurant des fonctions anciennement perdues, y compris dans les yeux. Des molécules comme le rapamycine, la métonomine, ou des senolytiques, déjà testés sur des petits animaux, prolongent la vie et ralentissent le vieillissement cellulaire. Mais la prudence règne : des effets secondaires ou des résultats encore incertains chez l’homme persistent.

Les ambitions extrêmes ne sont pas limitées à ces technologies. Le concept de “longevity escape velocity” (accélération de la longévité) suggère qu’un jour, les progrès médicaux pourraient ajouter plus d’un an d’espérance de vie à chaque année passée. Si cela devenait réalité, l’homme pourrait vivre indéfiniment — en tout cas tant que la science progresse assez vite. Des esprits futuristes comme Ray Kurzweil ou Aubrey de Grey estiment cette étape possible dès la fin des années 2020–2030. David Sinclair, généticien de Harvard, affirme même que la première personne qui atteindra 150 ans est probablement déjà née. 

Malgré ces projections, la réalité reste prudente : d’après les experts, aucune preuve solide n’indique que l’on vivra réellement jusque 150 ans bientôt. Le record humain reste bloqué à 122 ans. Les gains en espérance de vie concernaient davantage la moyenne, grâce aux progrès de la médecine, de la nutrition, et des modes de vie. La priorité doit rester la “healthspan“, c’est-à-dire la durée de vie en bonne santé, plus que la durée totale de vie .

Que retenir de cette course vers 150 ans ?

Un rêve séculaire et fascinant, peut‑être à notre portée un jour : la transplantation bio-ingénierée, les cellules souches régénératrices, les traitements ciblant les cellules mortes, la reprogrammation cellulaire, tous ouvrent des voies prometteuses. Mais toutes sont encore en phase expérimentale, souvent sur petits modèles animaux, et font face à des obstacles techniques, éthiques, financiers, biologiques. L’immortalité reste au stade d’idée stimulante, pas de réalité.

Pourtant, qu’il s’agisse d’un fantasme politique capté sur un micro ou d’une ambition scientifique, ce rêve nous pousse à dépasser les bornes de la nature. Et même s’il ne s’achèvera pas dans notre siècle, il nous oblige à repenser notre rapport à la maladie, à l’âge, et à notre condition humaine — sans cesser de croire qu’un jour, peut‑être, certains vivront jusqu’à …150 ans.

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